J’ai déjà parlé de la relation entre le vin et l’Arménie dans l’article sur les vins de Zorah. Pour rappel, on est dans la région du berceau de la viticulture. Il est donc intéressant de goûter et regoûter les vins issus de ces vignobles, surtout les cépages autochtones, francs de pied.
On commence, une fois n’est pas coutume par un rosé. ArmAs Rosé, produit dans la province de Aragatsotn, issu du cépage Karmrahyut qui veux littéralement dire « jus rouge », et pour cause, ce rosé a la couleur bien foncée. Je me demande même si il n’y a pas eu une légère macération pelliculaire comme un rosé de saignée. Ce n’est pas pour me déplaire.
Au nez, on sent des arômes puissants de fruits rouges et de fleurs. La bouche est ronde, fraîche et aérienne sur la fraise et la cerise.
Une vraie belle surprise. Parfait pour les journées chaudes d’été sans pour autant être insipide comme les rosés piscine de Province.
Tushpa, vin rouge de la vallée d’Ararat en Arménie, issu du cépage autochtone Haghtanak (victoire). Un vin bien équilibré, avec des tanins bien intégrés, des arômes de fruits noirs et de prune. Le passage en fût n’est pas excessivement marqué mais le vin manque tout de même un peu de fraîcheur.
Alluria produit à Etchmiadzine, issu des cépages Haghtanak (victoire) et Karmrahyut (jus rouge). C’est l’unique vin arménien revendiqué comme « naturel ». L’étiquette indique l’absence d’ajout de sulfites. A l’œil, la robe est d’un rouge profond envoûtant, limite noir. Au nez, on y sent des fruits confits, la griotte, la prune ainsi que des épices comme la réglisse le poivre et la cannelle. On retrouve la prune et la réglisse en bouche de façon assez lourde. Un vin qui rappelle pas mal le style Nappa Valley. Le potentiel de ce vin est pourtant là, dommage qu’un passage trop agressif en fût de chêne neuf masque son vrai visage.
La famille californienne Yacoubian s’est associée avec la star du vin américain Paul Hobbs pour faire du vin en Arménie dans la région de Vayots Dzor. J’ai pu goûter leur blanc issu des cépages autochtones Voskehat 50%, Khatuni 25%, Qrdi 20% et Garan Demak 5%. La robe est claire avec des reflets dorées. Le nez dévoile discrètement des notes florales assez agréables. La bouche moyennement acide avec une finale légèrement minérale. Y a pas de quoi casser 3 pattes à un canard même si c’est dans l’ensemble bien fait, orienté vers une clientèle internationale au goût assez standardisé.
Koor produit dans la région de Vayots Dzor sur le plateau de Aghavnadzor (vallée des colombes) a 1300 m d’altitude. Issu 100% du cépage autochtone Voskehat (rais d’or). Ici leur blanc, aux arômes discrets d’agrumes et d’ananas. Pas mal de finesse en bouche avec peu d’acidité. Parfait pour accompagner une salade ou un plateau de fromage. Des amis ont goûté le Koor blanc Réserve 2015 élevé en fût, et les retours étaient extrêmement positifs.
Pour conclure, cette dégustation me laisse sur ma faim. On sent clairement le potentiel immense de ce pays. Dommage qu’ils soient bridés par des techniques de vinification qui ne laissent pas le terroir s’exprimer. Il faut juste croire et miser sur la typicité du terroir, même si le résultat est loin des standards du consommateur lambda international. Peut-être moins d’intrants ? Oublier les élevages qui marquent trop. Privilégié l’inox et surtout un retour à l’élevage en amphore, tradition arménienne pluriséculaire.
Serko